L’intelligence ne se mesure pas au bout des lèvres - IRIS NEWS

Guillaume Muhozajanvier 22, 2025
Je rouve que - Guillaume Muhoza

Le Burundi est sans doute, à cette ère du pragmatisme, l’un des derniers endroits au monde où l’on associe la maîtrise du français ou de l’anglais à l’intelligence. Mais qu’est-ce que l’on se trompe ! 

J’allais étendre; dire que l’on confond intelligence avec une bonne « expression dans une langue étrangère », mais je me corrige : bizarrement, l’étiquette d’intelligence, ici, semble se limiter à ces deux langues. Curieusement, elle ne s’étend pas à la maîtrise du swahili. Celle-là est une langue des voyous, des illettrés. Pis!

J’ai souvent vu des individus être applaudis et qualifiés d’intelligents simplement parce qu’ils ont bien parlé français ou anglais.  Pourtant, ces éloges se bornent à des critères, si, ainsi, on peut les appeler,  bien superficiels : le débit de parole et la prononciation. Comme si la qualité d’un discours se mesurait à la vitesse des mots plutôt qu’à la profondeur des idées qu’ils véhiculent. Beaucoup écoutent, mais peu analysent. 


L’intelligence, voyez-vous, n’est pas la performance oratoire. C’est la capacité à transformer une idée brillante en action concrète. Les belles phrases, les envolées lyriques, c’est okay, mais quand vient le moment de faire, c’est là que ça se corse. Parce que là, entre ce qu’on dit et ce qu’on fait, il y a tout un gouffre.

Je n’en disconviens pas, savoir s’exprimer dans une langue, qui plus est n’est pas maternelle, est une forme d’intelligence ; il faut bien reconnaître que l’art de poser des mots sur des choses est une aptitude précieuse. Mais il y a là un piège : cette intelligence n’est qu’une façade si elle n’est pas suivie d’une capacité à agir.

Pour moi, l’intelligence véritable réside dans l’agir, non dans le parler. Elle ne se mesure pas à ce que l’on dit, mais à ce que l’on fait. À la manière dont on transforme ses idées abstraites en réalités concrètes. Car c’est là, justement, que réside l’échec de tant d’individus : bien des beaux parleurs sont incapables de traduire leurs paroles en actions. La question fondamentale, qui n’est jamais posée, est celle-ci : es-tu un faiseur autant qu’un parleur ?

L’intelligence, c’est aussi savoir se sortir d’une situation qui vous dépasse, tout en gardant la tête froide et en tirant parti de l’adversité. C’est cette aptitude presque magique à réinventer sa propre réalité face à l’inconnu. Pas besoin de milliers de mots pour ça. Il suffit d’une poignée d’actes réfléchis, ajustés à la circonstance. C’est là que l’intelligence se mesure, dans l’art de ne pas se perdre quand tout s’effondre autour de toi, dans la manière dont tu réorganises les morceaux éparpillés.

L’intelligence, c’est cette capacité à naviguer à travers des contextes nouveaux, changeants, difficiles, avec le minimum d’informations possibles. Est-ce que tu serais capable de survivre si l’on t’amenait dans un lieu où tu n’as jamais imaginé vivre ? Quels outils et compétences possèdes-tu pour y survivre, mais aussi y prospérer ? Parce que, c’est là, dans la capacité à s’adapter à l’inattendu, que se trouve la véritable intelligence.

L’intelligence, c’est aussi faire face à la difficulté, persévérer malgré les obstacles. Sir Alex Ferguson, ancien manager de Manchester United, le dit bien : Hard work is a talent, soit « Le travail acharné est un talent. »
L’intelligence, c’est aussi la capacité à accomplir de grandes choses avec peu de ressources, à faire beaucoup avec peu, à multiplier les effets avec des moyens limités. Peu sont capables de cela, et pourtant, c’est là une forme d’intelligence hors du commun.

Ainsi, la prochaine fois que tu croiseras un individu qui parle bien français, ne te laisse pas aveugler par la beauté des mots. Va au-delà, interroge-toi sur ce qu’il fait réellement de ses idées bien articulées sur la bouche. C’est là, dans l’action, que l’on peut vraiment juger de l’intelligence. Pas dans la beauté des mots, mais dans la profondeur des actes.

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Chaque matin, Guillaume Muhoza se lève tôt et nous livre son « JE TROUVE QUE », une série d’élucubrations souvent futiles, qu’il puise dans son vécu, dans les choses et les gens qui l’entourent, ainsi que dans l’actualité du Burundi et du monde. Lorsqu’il ne se laisse pas emporter par l’émerveillement face à des « riens », il ressasse les disques rayés de ses souvenirs évanescents ou rumine les peines d’un jeune homme égaré, pris dans la ronde des jours qui s’enchaînent et se confondent.

 

Guillaume Muhoza


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