
Des entrepreneurs et opérateurs privés du secteur de la santé ont pris la parole pour dénoncer les nombreuses difficultés qui entravent l’essor de leurs activités, dans un pays où la demande de services de soins de qualité, rapides et accessibles ne cesse pourtant de croître.
Ces préoccupations ont été au cœur d’un échange organisé à Bujumbura le 12 juillet 2025 par l’organisation Resolution Connect, dans le cadre de son projet Mvura. La rencontre a réuni des chercheurs, des experts en santé publique, des praticiens issus du privé comme du public ainsi que des représentants des autorités locales et nationales.
Objectif : dresser un état des lieux des défis auxquels se heurte le secteur de la santé au Burundi et réfléchir à des solutions concrètes permettant de lever ces blocages. Les discussions ont permis de faire émerger un constat partagé : sans un cadre plus favorable aux initiatives privées, le système de santé burundais aura du mal à répondre aux attentes croissantes des populations.
Un environnement administratif et réglementaire lourd
Pour ces entrepreneurs, l’environnement est parfois opaque, et la lenteur dans l’octroi des autorisations est devenu un frein majeur. Certains expliquent que les dossiers déposés pour obtenir le droit d’exercer restent des mois sans suite, quand ils ne sont pas purement et simplement rejetés sans explication claire. Dans d’autres cas, l’accélération des procédures ne se fait qu’au prix de pots-de-vin, ce qui décourage les petites initiatives et renforce un sentiment d’injustice.
À ces obstacles bureaucratiques s’ajoutent des contraintes financières considérables. Les taxes imposées sur les médicaments importés sont jugées excessives, ce qui alourdit les coûts de revient et se répercute inévitablement sur les prix pratiqués dans les pharmacies et centres de soins.
Certains acteurs privés disent également se heurter à l’impossibilité d’obtenir les autorisations nécessaires pour introduire légalement certains produits pharmaceutiques dans le pays, ce qui pousse parfois à des pratiques informelles et augmente les risques de circulation de produits non contrôlés. Le coût globalement élevé des médicaments au Burundi reste ainsi l’une des préoccupations majeures, tant pour les patients que pour les professionnels de santé.
Des pistes de réforme évoquées
La digitalisation des procédures est apparue comme une priorité. Elle permettrait de simplifier et de fluidifier les démarches administratives, en offrant aux entrepreneurs un accès direct aux informations et aux documents nécessaires, sans avoir à multiplier les déplacements dans différentes administrations ni à subir les lenteurs des circuits traditionnels. Les participants ont également insisté sur la nécessité d’une meilleure éthique dans la délivrance des autorisations, afin d’éradiquer les pratiques de corruption qui minent la confiance et découragent l’investissement. Enfin, plusieurs voix se sont élevées pour réclamer une décentralisation des compétences : donner aux gouverneurs de province le pouvoir d’octroyer des agréments pour l’ouverture de pharmacies, de cliniques ou de laboratoires permettrait, selon eux, de rapprocher l’administration des réalités locales et de rendre le processus plus rapide et plus adapté aux besoins.
Pour le docteur Audry Murorerwa, qui présentait un exposé intitulé « Investir dans la santé au Burundi : défis et opportunités du secteur privé », le rôle des entrepreneurs et investisseurs privés dans ce domaine ne peut être sous-estimé. Il rappelle que, même confrontés à de nombreuses entraves, ces acteurs contribuent déjà à diversifier l’offre de soins et à introduire de pratiques médicales modernes dans le pays. « Même si les obstacles sont réels, leur contribution au développement du pays est déterminante ».