Guillaume Muhozajanvier 26, 2025
Si cet article arrive jusque dans les mains de ma mère, je saurais de l’indiscrétion des gens d’ici. Elle, qui m’a bercé aux rosaires et aux messes matinales, je n’ai aucune envie de la froisser en découvrant ce que je m’apprête à dire dans ces lignes.
Il y a bien longtemps que je n’ai pas mis les pieds à la messe. Je précise d’emblée : je ne suis pas athée, loin de là. Je crois en Dieu et je prie tous les jours. Mais j’ai du mal à me reconnaître dans les dogmes et les rites qui accompagnent souvent la pratique religieuse.
À mon avis, la foi est une affaire personnelle, intime, qui ne se réduit pas à des pratiques collectives. Chacun doit trouver sa propre manière de se connecter au sacré, sans forcément passer par des institutions religieuses. Voilà qui est dit.
Je trouve qu’au Burundi, la religion chrétienne est omniprésente. Les églises sont nombreuses, les processions régulières. Mais quelle est la place de la foi dans la vie quotidienne des Burundais ? Est-ce une source de réconfort, un guide moral, ou simplement une habitude transmise de génération en génération ?
Je ne peux m’empêcher de constater une certaine dissonance entre les préceptes de l’Évangile et les réalités de notre société. Les valeurs d’amour du prochain, de pardon et de justice sont belles sur le papier, mais elles semblent bien loin de l’égoïsme, de la méchanceté et de la corruption qui gangrènent notre pays.
Pourquoi allons-nous à la messe chaque dimanche ? La plupart des Burundais sont des fonctionnaires. Mais regardons un peu ce qu’ils font dans leurs emplois. Quel service rendent-ils ? Pour moi, faire du bien autour de soi, accomplir ce à quoi on est appelé dans la société, est déjà un acte de foi plus authentique qu’aller à la messe. Alors pourquoi y aller ?
Pourquoi allons-nous vraiment à la messe chaque dimanche ? Pour échapper à la réalité ? Pour afficher une moralité que nous n’avons pas ? Ou simplement par habitude, parce que c’est ce que l’on fait depuis toujours ? Je ne prétends pas avoir toutes les réponses. Je pose simplement des questions qui me taraudent.
Encore une fois : pourquoi allons-nous à la messe chaque dimanche ? Pour tromper Dieu ? L’Infaillible ? Celui qui voit tout, même nos pensées les plus secrètes ? Serait-ce pour apparaître bien dans les yeux des autres ? Si c’est le cas, on vit chez les fous !
Le dimanche, si tu y réfléchis bien, est une vaste mascarade. Chacun s’habille de ses plus beaux atours, cache à peine sa malhonnêteté sous des sourires hypocrites, et se rend à l’église dans l’espoir de duper Dieu. Mais au bout du compte, on se dupe soi-même.
On brandit sa Bible pour se donner bonne conscience, on lève la main, et on se déclare moral. Mais si l’on veut vraiment vivre selon des valeurs morales, il serait peut-être plus sage de puiser dans la sagesse de nos ancêtres, ou tout simplement de faire appel à son bon sens, au lieu de se perdre dans des préceptes vieux de plusieurs millénaires, écrits pour d’autres peuples, dans d’autres époques.
Le dimanche, c’est une blague. Une véritable comédie où chacun joue un rôle. L’heure de l’hypnose collective, où chacun se convainc qu’il est en paix avec Dieu, simplement parce qu’il est allé à la messe, au lieu de faire et de prêcher le bien autour de lui.
Bon dimanche, ou pour ne pas être hypocrite, bienvenue au festival des clowns.
—————————-
Chaque matin, Guillaume Muhoza se lève tôt et nous livre son « JE TROUVE QUE », une série d’élucubrations souvent futiles, qu’il puise dans son vécu, dans les choses et les gens qui l’entourent, ainsi que dans l’actualité du Burundi et du monde. Lorsqu’il ne se laisse pas emporter par l’émerveillement face à des « riens », il ressasse les disques rayés de ses souvenirs évanescents ou rumine les peines d’un jeune homme égaré, pris dans la ronde des jours qui s’enchaînent et se confondent.
